Genre et TIC

A la rencontre d’une battante !!
Notre équipe de reportage a rencontré en Janvier dernier à Ouagadougou Annie Chéneau Loquay,. Cette femme, dynamique , qui bataille sur plusieurs fronts en ce qui concerne les TIC, a eu à produire plusieurs articles et publications dans ce domaine. Elle est avant tout une personne ouverte qui a eu du plaisir à nous parler du but de sa tournée en Afrique de l’Ouest et à partager avec nous son avis sur certains questions en relation avec les TIC.


Qui est Annie Chéneau Loquay

Directrice de recherche au CNRS Centre National de la recherche scientifique français, dans un laboratoire de sciences politiques à Bordeaux, le Centre d’étude d’Afrique noire, Annnie Chéneau Loquay est géographe et un peu socio-économiste également.

But de sa visite au Burkina Faso et dans les autres pays d’Afrique.

Je suis au Burkina Faso depuis une semaine après avoir passé trois semaines au Sénégal et une semaine au Mali dans le cadre du programme de recherche Africanti qui existe depuis quelques années. C’est à la fois un programme et un réseau de recherche. Nous avons cherché à regrouper des compétences à créer des échanges sur les questions des nouvelles technologies de la communication en Afrique avec des collègues qui sont dans différents pays, Africains surtout. Nous avons actuellement l’idée de monter un programme de recherche –action sur la dynamique des accès public en Afrique. C’est pourquoi je suis venue au Burkina Faso pour une étude exploratoire pour identifier les problèmes.

Les activités menées durant le séjour au Burkina Faso ?

Durant son séjour Annnie Chéneau Loquay a rencontré un certain nombre de personnalités au niveau politique pour comprendre les stratégies en matière de Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication. « J’ai aussi rencontré des propriétaires de cyber centres (grands et petits) pour savoir comment ils travaillent, où ils en sont, quelles est leur clientèle, quels sont leurs problèmes. Et enfin j’ai essayé d’avoir une vue générale sur la géographie des cyber à Ouagadougou. » nous confie-t-elle.

Son avis sur l’évolution des NTIC au Burkina ?

Le Burkina, tout comme le Mali et le Sénégal, est dans une phase de pause concernant la dynamique des accès publics. Il y avait jusqu’en 2002 une certaine dynamique dans les grandes capitale africaines comme Dakar, Bamako et Ouagadougou . Aujourd’hui beaucoup de cyber centres surtout les petits ont fermé à cause de la concurrence. Au Burkina, il y a un problème particulier. C’est celui de la connectivité. En effet elle est très faible. Si un cyber café est en RTC c’est à dire en liaison téléphonique, il ne peut pas travailler correctement et ne peut pas être rentable. Quelques uns réouvrent mais en demandant une ligne spécialisée dont obtention est d’ailleurs difficile dans ce pays. Ceux qui arrivent à en avoir une peuvent couvrir leur frais à partir d’un certain seuil et certains font des bénéfices mais ce n’est pas évident. En ce moment il y a un certain nombre de blocages le secteur est très fragile. Il faut que la connectivité augmente et que les prix baissent. Les coûts sont en effet plus élevés au Burkina que dans d’autres pays. Ils devraient connaître une baisse très bientôt, selon les responsables de l’ONATEL.

Il y a aussi un problème de gestion de ces entreprises. Ce sont des entreprises qui sont difficilement rentables donc il faut savoir les gérer ce qui implique des prévisions et des investissements corrects. Or beaucoup se lancent dans cette activité sans en connaître les spécificités, sans formation particulière. Au lieu d’utiliser du matériel neuf dernier cri , on pourrait utiliser des matériels d’occasion par exemple, ou des ordinateurs montés sur place, la question de la maintenance se pose aussi. Mais le gros problème reste celui de la connectivité et des prix.

Que peut-on attendre des rencontres que vous avez eues avec les responsables politiques surtout concernant le monopole de l’Etat dans le domaine de télécommunication ?

Les pays africains sont dans une phase de transition. Dans tous ces pays les opérateurs de télécommunication étaient des opérateurs publics, ce que l’on appelle opérateurs historiques et ils sont poussés à libéraliser le secteur et à privatiser. Au Burkina, l’ONATEL est toujours l’opérateur historique, il lui faut donc changer de mentalité, pour arriver à l’ouverture, à la libéralisation, à la privatisation. C’est un changement complet qui demande des efforts de sa part . C’est une vraie révolution qui doit être faite, les responsables de l’ONATEL en sont très conscients et apparemment l’idée de privatisation est acceptée et je pense que les choses devraient évoluer s’il y a une véritable volonté. L’ouverture est prévue pour 2005, y aura t’il ensuite des repreneurs qui se présenteront ?

Africanti ?

Africanti, c’est une idée que j’ai eue il y a quelques années, en 1998. Je me suis dit que travailler sur la question des NTIC en Afrique était intéressant . On a là des phénomènes à la fois technologiques, sociologiques, politiques qui sont au cœur des transitions du monde d’aujourd’hui. Travailler sur les NTIC ce n’est pas travailler sur des outils, c’est un objet de recherche au sens plein et au travers de ces recherches on voit la transition vers la globalisation, toutes ces questions de libéralisation, de privatisation, tous ces changements de culture.

J’ai commencé et j’ai persisté. Africanti était au début un petit programme de recherche ensuite j’ai pu obtenir des financements plus conséquents ( du Ministère des Affaires étrangères), il est aujourd’hui un réseau de chercheurs ,du Nord et surtout du Sud, en Afrique. Le programme a travaillé au Sénégal sur le secteur informel, au Mali sur une approche régionale des NTIC dans deux régions, au Ghana sur une approche politique des NTIC, en RDC , au Cap Vert etc.

Nous avons un site Internet, www.africanti.org qui est connu. Notre politique, c’est la transparence de nos résultats et de nos activités. La rubrique Résultat est la plus consultée parce que nous y publions des mémoires d’étudiants du programme et aussi externes au programme et mettons en ligne des articles. Nous avons mis en ligne récemment l’ouvrage collectif « Enjeux des technologies de la communication en Afrique, du téléphone à Internet » qui a été publié en 2000 et qui est épuisé. C’est un site régulièrement actualisé. Il y a également un forum, fermé. Nous avons des rencontres annuelles du réseau qui se déroulent à Hourtin en France à l’Université d’été de la communication. En 2003 nous y avons organisé un colloque sur la fracture numérique. Maintenant nous sommes en phase de consolidation du réseau. Il est assez solide et 13 pays sont concernés.

A partir d’Africanti d’autres réseaux se sont crées et des partenariats ont été établis. Du point de vue de la recherche nous comptons faire connaître véritablement les processus concernant l’insertion des NTIC les modes d’accès, les usages, les effets concrets. Il y a trop d’idées préconçues et de discours utopiques sur ces questions. Les bailleurs de fonds raisonnent en fonction de leur propre milieu. Les Africains sont différents, ils ont leur manière d’appréhender les choses.

Nous avons une revue dénommée Net Sud et nous voulons qu’elle soit un lieu d’expression de chercheurs africains, qu’ils puissent avoir la possibilité de faire des publications dans des revues de bon niveau scientifique.

Le Sommet mondial sur la société de l’information et décisions importantes pour l’Afrique.

Je ne pense pas que des décisions importantes aient été prises. Il y a eu un texte compliqué, il y a eu un bras -de –fer entre société civile, secteur privé et pouvoir politique. Le point positif pour l’Afrique c’est que la question de la fracture numérique était au centre des débats. Les Africains se sont vraiment faits entendre pour une fois. Ils ont été très actifs. La notion de « solidarité numérique » avancée par le Sénégal a été reprise par tous les participants africains et au delà. Elle a été rejetée d’abord par tous les pays occidentaux mais ils ont accepté par la suite de considérer quand même la question. Je trouve cette notion intéressante, il faut maintenant l’analyser et bien la cerner. Je ne comprend pas pourquoi l’Union Européenne a été aussi réticente.

La coopération Nord-Sud en matière de nouvelles technologies .

J’ai écrit avec un collègue congolais, un article sur la coopération internationale. C’est une approche critique de la coopération. Nous avons montré que c’est souvent la vision du Nord qui domine. En Afrique les questions de développement sont toujours considérées sous l’angle de la réduction de la pauvreté, ce qui est réducteur. On considère toujours que se sont ceux du Nord qui apportent « la bonne parole » à ceux du Sud. C’est une attitude toujours présente dans la coopération, parler de partenariat est facile, y arriver pose beaucoup de problèmes.
Faire de la recherche pour moi, c’est avoir une approche critique. C’est analyser avec rigueur un phénomène et dire ce que l’on en pense. La critique est au cœur même de la recherche à condition de l’argumenter.

Pour Annie Chéneau Loquay

Il faudrait que les gens du Sud se concertent davantage, qu’ils s’inspirent des expériences des autres sur les questions de NTIC, qu’ils trouvent en particulier les moyens de créer un hub africain au niveau des infrastructures pour réduire leur dépendance. Il y a des solutions qui ont été déjà trouvées dans d’autres pays sur un certain nombre de problèmes, il faut s’inspirer des expériences des autres pour s’enrichir.


ITW de T.SOMDA

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