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Quand on parle de recherche scientifique, on pense que c’est une recherche qui s’adresse uniquement aux universitaires

Une recherche sur le secteur informel des TIC en Afrique a démarré depuis quelques mois sous la coordination de l’association Yam Pukri. Cette recherche qui couvre 3 pays (Burkina, Cameroun, Sénégal) vise à appréhender le phénomène du secteur informel des TIC en Afrique et à constater les enjeux liés à sa croissance et à son développement. Afin d’entonner le même refrain, les chercheurs se sont rencontrés pour discuter à bâtons rompus. Ce fut au cours d’un atelier méthodologique organisé du 17 au 21 novembre 2008 à Ouagadougou. Elle a réuni des spécialistes venus de plusieurs pays dont la France, le Sénégal, le Cameroun et le Burkina. Nous avons profité de l’occasion pour tendre le micro à la seule femme chercheuse qui vient du continent africain et qui est d’origine camerounaise. Il s’agit de Robertine Tankeu Keutchankeu, Coordinatrice Anais.ac, membre du réseau de recherche RIA « ResearchICTAfrica » et Correspondante Régionale « World Dialogue on Regulation »

Vous êtes originaire du Cameroun, pouvez-vous nous faire un état des lieux du secteur informel de votre pays ?

Le secteur informel des TIC au Cameroun connait une expansion depuis six ans. Quand on parle de ce secteur, on fait beaucoup plus allusion aux Call Box. Ce sont des espèces d’unités installées en bordure de route, dans lesquelles les gens peuvent appeler. A cette date, on compte plus de 25.000 Call Box à travers le Cameroun et la majorité est implantée en milieu urbain. En résumé, je dirai que les Call Box sont vraiment une spécificité camerounaise, même si dans d’autres pays, ils existent sous d’autres appellations. Aussi, constate-t-on un phénomène lié au secteur des TIC. En effet, les Call Box sont en majorité gérés par les femmes. J’espère que cette étude va permettre de comprendre ce phénomène. Les autres sous-secteurs des TIC comme l’informatique, la vente du matériel informatique et des portables, connaissent néanmoins un certain développement.

Robertine Tankeu
Membre de ANAIS Cameroun, Chercheur National au Cameroun dans le cadre du projet de recherche TIC INFOR

Vous faites partie du groupe de chercheurs sur le secteur des TIC, dites-nous en quoi, une recherche peut-être utile ou bénéfique à ce secteur ?

L’objectif de cette recherche est de mieux appréhender le secteur et de voir quel est le rôle qu’il joue sur le plan économique et social. Si on l’atteint, il va non seulement aider les acteurs, mais aussi servir de repères aux acteurs au niveau politique. Si je prends le cas du Cameroun et des autres pays concernés par la recherche, de pareilles études n’ont pas été faites. Au Cameroun, des études sur le secteur informel en général, ont été réalisées par l’institut national de la statistique. Il n’y a nulle part dans cette recherche, des éléments qui mettent en évidence le secteur des TIC en particulier. Les décideurs politiques peuvent bien s’inspirer de cette étude pour prendre des décisions idoines afin de développer le secteur. Quand je dis « développer », je pense à la croissance des activités dans l’optique d’une meilleure organisation du secteur informel des TIC. Dans la plupart des cas, ces secteurs sont fragiles et précaires. Parfois, ce n’est pas par manque de moyens, mais c’est parce qu’ils sont très peu organisés et peu structurés.

Après trois jours de réflexion, quel bilan à mi-parcours pouvez-vous dresser de l’avancée des travaux ?

Jusqu’à cette date, je suis satisfaite de l’évolution des travaux. C’est vrai que j’ai raté la première journée à cause de la programmation des vols, mais j’ai pu prendre le train en marche. Quand je dis « satisfaction », ce n’est pas sur une base arbitraire. Je me base sur le programme d’activités qu’on s’était fixé. Les discussions sont assez intenses. Peut-être qu’on évolue bien parce qu’on va au delà des programmations horaires qu’on s’était fixées, ceci dans l’optique d’atteindre l’objectif de l’atelier qu’on a établi. Parfois on est obligé de briser certaines barrières comme, par exemple réduire les temps de pause et aller au-delà des heures en soirée. C’est assez riche et intense et ça valait la peine. Donc, le bilan à cette date est positif.

Séance de travail des chercheurs

Au départ de ce projet, il y a des chercheurs. Selon vous, qui seront les personnes (acteurs) habilitées à mettre en œuvre les résultats de cette recherche ?

Quand on parle de recherche scientifique, souvent, on pense que c’est une recherche qui s’adresse uniquement aux universitaires, aux chercheurs dans les laboratoires. Pour notre cas, c’est une recherche-action. Si je prends en compte tous ces éléments, je dirai que cette recherche s’adresse autant aux acteurs du secteur des TIC qu’aux décideurs politiques et économiques. Les recommandations qui seront formulées, doivent-être prises en compte par les décideurs, pour redynamiser le secteur. Les médias doivent également jouer un rôle prépondérant dans la vulgarisation des résultats de la recherche. Il arrive que les politiques veuillent biaiser les résultats de la recherche en y introduisant le politique. C’est pourquoi, les médias seront sollicités pour disséminer les résultats qui vont être produits à l’issue de la recherche. Et même les associations à la base, qu’elles soient du secteur ou pas, peuvent bien relayer l’information. Notre vœu est de voir les résultats intégrés, dans la mesure du possible, dans les politiques et stratégies des différents gouvernements.

Quelles seront les grandes étapes de cette recherche et comment aller-vous procéder pour atteindre les objectifs fixés ?

C’est une recherche scientifique et il faut faire très attention à la méthodologie, pour ne pas être attaqué par la suite. En gros, il y a trois grandes étapes qui vont permettre de mener à terme cette recherche. La première étape qui a commencé depuis Juin, va continuer jusqu’à la phase de la collecte des données. Celle-ci devrait commencer en principe en Janvier. Présentement, il est question d’explorer le terrain et de dresser un état des lieux à savoir qui fait quoi, qui est déjà dans le secteur et comment ? Cette étape visait à nous aider à mieux procéder au niveau de la phase collecte des données. Elle va aussi aboutir à l’élaboration d’outils pour collecter les données. On devrait finaliser les outils d’ici à décembre. Il faut vraiment concevoir des outils appropriés pour recueillir des données qui vont servir à l’analyse. Dans chaque pays concerné par l’étude, nous allons procéder par une collecte de données qualitatives à travers des entretiens, des récits de vie et des observations. La collecte des données quantitatives va aboutir à l’analyse statistique à travers un questionnaire spécifique aux promoteurs du secteur informel. On verra dans quelles mesures on va élaborer un questionnaire pour les institutions en général. Enfin, on va déterminer l’échantillon qui sera concerné par l’étude.

Laurentine Bayala

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